Qu'est-ce qui cloche ?

 Où ont été fondues les cloches de St Pierre ?

Article d'Alain Cadet, paru dans La Voix du Nord. Documents de Philippe Leroux.

À partir de 1916, en vertu des ordonnances de réquisitions des métaux non ferreux de l’armée occupante, les Allemands commencent à confisquer le cuivre et le bronze pouvant servir à réparer ou à fabriquer armes et munitions. C’est ainsi qu’au premier trimestre de 1917 les églises des communes de Flers, Annappes, Ascq, Hellemmes ou Mons-en-Barœul, sont délestées de leurs cloches, certaines parfois plusieurs fois centenaires.



Cette frénésie de réquisitions concerne également le zinc des gouttières, la fonte et l’acier des monuments mais aussi les denrées alimentaires, bétail, linge, meubles, bouchon de liège, vin, outils et ustensiles de cuisine, caoutchouc… Même les matelas sont impitoyablement confisqués !


Après les cloches, les tuyaux d’orgue !

À Mons-en-Barœul, les Allemands dérobent deux cloches le 22 mars 1917. La plus grosse pesait 880 kg et portait comme inscription : « Je me nomme Henriette. J’ai été bénite en juillet 1885 ». Sur la plus petite (219 kg), on pouvait lire : « Je me nomme Pierre. Je suis venu remplacer une devancière provenant du prieuré de Fives, qui a perdu la voix après 300 années d’existence ». Plus tard, l’ennemi enleva aussi les tuyaux d’orgue pour récupérer le métal.


La commune de Mons-en-Barœul n’était pas la première de la liste. Le 22 février 1917, les trois grosses cloches de l’église Saint-Pierre-en-Antioche d’Ascq (Eugénie Aldegonde, Françoise Amélie et Pétronille Albertine) datant de 1842 et 1843, ainsi que les neuf petites cloches du carillon, avaient été emportées par les soldats allemands pour une destination inconnue.


La même scène se répète dans les villes et villages alentours. Ainsi, à Hellemmes, le 1er mars 1917, les tuyaux d’orgue de l’église Saint-Denis sont arrachés et les trois cloches jetées à bas du clocher.

Pour tout le monde, elles ont été envoyées en Allemagne. Mais en réalité, elles n’étaient pas si loin ! Elles avaient toutes été transportées pour être fondues dans le vaste atelier de réparation de canons et autres matériels militaires du 121e bataillon d’armement. L’armée bavaroise l’avait installé dans les locaux des ateliers du Chemin de fer du Nord d’Hellemmes, entre 1914 et 1918. A. C. (CLP)

Les dommages de guerre

Une lettre écrite par A. Salembier, curé de Mons-en-Barœul, datée du 27 février 1920, détaille la réquisition par l'armée allemande des 2 cloches et des tuyaux d'orgue de l'église Saint Pierre. (Archives municipales / Dossier dommages de guerre de l'architecte de la ville Gabriel Pagnerre). 


Monsieur le Maire.
Les deux cloches de Mons-en-Barœul ont été enlevées le jeudi 22 mars 1917. Contrairement à ce qui a été fait dans d'autres communes, elles n'ont pas été brisées pour les descendre plus facilement, mais elles ont été enlevées intactes.
La grosse cloche pesait 809 kilos et portait comme inscription : " J'ai eu pour parrain Merci François Andriés et pour marraine Mme Céline Cuvelier.


Je me nomme Henriette, bénite en juillet 1885. Merci Henri Comère, curé, Merci Alexandre Delemar, maire de Mons-en-Barœul. Je dois le jour à la générosité des paroissiens. En dessous un Christ et le nom de Merci Droust, fondeur.
La petite cloche pesait 219 kilos et portait comme inscription : " Je m'appelle Pierre. J'ai eu pour parrain Merci François Andriés et pour marraine Mme Céline Cuvelier. Je suis venue en juillet 1885, remplacer ma devancière, laquelle provenait du prieuré de Fives, a perdu la voix après 300 ans d'existence. Merci Henri Comère, curé, Merci Alexandre Delemar, maire de Mons-en-Barœul.


En raison des souvenirs historiques qui s'attachaient à cette dernière cloche, j'ai fait tous mes efforts pour la conserver. J'ai prié également la municipalité de cette époque de prendre cette cause en mains pour garder la sonnerie de l'horloge ; mais tous ces efforts furent inutiles.
Vers la même époque, un peu plus tard, les tuyaux des orgues furent enlevés. Les Allemands n'ont pas donné, malgré ma demande, de bons de réquisition. Il me semble qu'il y avait pour 14 kilos d'étain.
Veuillez agréer, Monsieur le Maire, l'hommage de mes meilleurs sentiments.
27 février 1920. A. Salembier, curé de Mons-en-Barœul.

Lettre datée du 16 janvier 1922, adressée par Gabriel Pagnerre, architecte agréé de la ville de Mons-en-Barœul, au maire de cette commune au sujet des réparations des dommages de guerre concernant les cloches de l'église saint-Pierre.




Une petite erreur s'est glissée dans cet article à propos du poids de la plus grosse cloche Henriette qui pesait 809 kilos et non pas 880.


Les 2 cloches La Victoire et La Paix qui ont remplacé Henriette et Pierre fondues par les allemands

Un complément est paru, toujours sous la plume d'Alain Cadet, dans La Voix du Nord du jeudi 7 décembre 2017




Un nouvel article sur le même thème est paru dans la Voix du Nord du vendredi 22 octobre 2021, également sous la plume d'Alain Cadet