Le sentier des près


Mons-en-Barœul : avant l'histoire de la ZUP, il était une fois le sentier des Près

Publié par Alain Cadet le 31 juillet 2016 dans Nord Eclair et La Voix du Nord



Du temps où la commune de Mons-en-Barœul n’était encore qu’un gros village, de multiples chemins aux noms poétiques sillonnaient la campagne environnante. Ils ont presque tous disparu pour laisser place à la ZUP, décidée au début des années 60. Petit coup d’œil dans le rétro avant ce tournant.

Le sentier des Près (ou chemin rural n°5) portait bien son nom. Il partait, au niveau de la rue Jean Jaurès, pour rejoindre la rue Faidherbe, puis la rue Rabelais aboutissant de la sorte à la Plaine du Fort. C’était un itinéraire exclusivement campagnard. Mais, à cette époque du milieu des années 1950, la ville de Lille est à l’étroit dans son enceinte historique : elle est dans l’impossibilité de poursuivre son expansion. Ainsi décide-t-on de créer, à Mons-en-Barœul, la plus grande « zone à urbaniser en priorité » de la métropole. Le 9 mars 1957, le conseil municipal donne un avis favorable à l’avant-projet. Le 27 novembre 1959, il décide officiellement «  de créer une ZUP sur la plaine de Mons  ». Le 9 juillet 1963, le plan de masse d’Henri Chomette, architecte-urbaniste, est adopté par le maire, Félix Peltier, et son conseil municipal. La plaine de Mons est divisée en quatre parties au moyen de deux axes perpendiculaires structurants, avenue Schuman / avenue Sangnier.



L’avenue Schuman va reprendre en partie le tracé du sentier des Près. C’est un chemin d’accès très large qui, dans un premier temps, va desservir les chantiers de construction des nouvelles résidences et, en particulier, celle de l’Europe, avec ses tours emblématiques dessinées par Henri Chomette lui-même. Du côté de la rue Jean Jaurès, un petit bout du sentier des Près va perdurer quelques années. On y dénombre quelques maisons ouvrières et de belles « bourgeoises ». À la fin des années 1960, toutes ces maisons seront démolies.



On aura ainsi créé un axe est-ouest comportant les avenues Émile-Zola (élargie), Acacias et Schuman (créées). Cet axe est droit et large, parfaitement adapté à la circulation automobile. Ce petit bout du sentier des Près, élargi, prend le nom d’avenue Schuman. Tout autour, on construit 5 600 logements destinés à accueillir 20 000 nouveaux habitants. Dix ans plus tard, en 1976, avec une densité de 10 000 habitants au kilomètre carré, la commune n’est pas loin d’atteindre les 30 000 habitants.



En 1963, le conseil municipal adopte la délibération « Désaffectation d’un chemin rural (n°5), besoin des terrains d’assiette à la Société d’Équipement du Département du Nord ». C’est l’acte de fin du sentier. La voici restituée.


« Monsieur le maire expose que le sentier des Près, chemin rural n° 5, qui débute aux abords de la rue Jean Jaurès pour aboutir à la rue Faidherbe (chemin départemental n° 48) et reprendre un peu plus au sud pour se terminer à la rue Rabelais (ex chemin rural n° 2) n’a pas été repris dans la décision de classement de la voirie communale prise par le conseil municipal dans sa délibération du 8 juillet 1959, approuvée par arrêté préfectoral du 10 juillet 1959 […] du fait de sa largeur inégale, son tracé, son assiette, sa situation dans les terres de culture ne permettaient pas une circulation normale. Il relève donc maintenant du domaine communal tout en ayant conservé son caractère de chemin rural livré à la circulation publique. Cependant, ce chemin est tout entier inséré dans la Zone à urbaniser par priorité installée sur le territoire communal par arrêté ministériel du 15 avril 1960 dont le plan d’aménagement après enquête a été déclaré d’utilité publique par arrêté préfectoral du 10 janvier 1963. Incorporé dans un vaste ensemble de terrains livrés à la construction dépourvu de moyens de circulation adaptés, il n’a plus de raisons de subsister ».

La suite est parue le mercredi 3 août



Avant la ZUP : la belle « Quatre chevaux » d’Alexander dans le sentier des Près  

Cette photo (version originale ci-dessous © Eugénies) prise entre 1955-1956 témoigne d’un aspect de la commune disparu : le tout petit sentier des Près, partant de la ville et sillonnant la campagne. Ce cliché dont la partie gauche n'a pas été coupée permet de mieux comprendre le texte d'Alain Cadet, paru dans La Voix du Nord, le mercredi 3 août 2016. 



La Renault 4 CV, conçue secrètement pendant les années de guerre, spacieuse pour l’époque malgré ses petites dimensions, et surtout abordable financièrement, devient une voiture très populaire dans les années 1950. L’heureux propriétaire de celle-ci s’appelle Alexander Wilson. C’est un ancien sous-officier de l’armée britannique qui, après la Première Guerre mondiale, s’est établi en France pour fonder une famille. Avec son épouse, Rufine, il fait construire en bordure du bourg une maison tournée vers la campagne. On y accède par une toute petite voie cendrée : le « sentier des Près ».

C’est à cet endroit qu’Alexander a arrêté sa « Quatre chevaux » rutilante et s’est fait photographier par son fils, Alex Wilson. « J’avais acheté un Voigtlander pendant mon service militaire en Allemagne, se souvient-il. Il faisait de bien meilleures photos que la plupart des appareils français. La voiture était garée juste devant la maison. Elle existe toujours, et désormais, c’est moi qui l’habite. Mais dans les années 1950, le sentier était une voie privée. Chaque propriétaire de maison possédait aussi la demi-portion du sentier mitoyenne qu’il devait entretenir. Quand il y avait des trous, on les bouchait avec des cendres. »

Alex se souvient très bien de cette 4 CV familiale. Entre 1956 et 1958, comme son père Alexander avait des difficultés à conduire et qu’ils travaillaient tous les deux dans la même usine Massey-Ferguson, c’est lui qui conduisait pour aller du domicile au travail. Très peu de Monsois possédaient une automobile, comme par exemple cette Ford noire d’un voisin, stationnée au bout du sentier. Sur la photo d’Alex, on voit bien ce qu’était « le sentier des Près ». À gauche, les barrières derrière lesquelles se trouvait la maison des Wilson. À droite, de grandes bâtisses du début du XX e siècle. Le long de ces maisons coulait un petit ruisseau qui partait vers la campagne. On la distingue, au loin, avec le massif d’arbres du fort MacDonald.

À gauche, on voit l’extrémité de l’avenue de la Liberté, particulièrement le nº 49 qui n’a guère changé. Mais les belles maisons bourgeoises de droite ont été démolies pour élargir la voie et assurer la communication entre l’avenue Victor-Hugo et l’avenue Robert-Schuman.

Aujourd’hui, cette petite portion appartient à cette dernière avenue. A. C. ( CLP)


Le quartier Lyautey

Publié par Alain Cadet dans La Voix du Nord le dimanche 7 août 2016.

Nous sommes en 1967, à l’extrémité ouest du parking Lyautey. L’avenue toponyme vient d’être créée. On ne la voit pas à cause des herbes hautes du champ mais elle serpente le long de la clôture. Pour l’instant, c’est un large chemin bitumé, qui s’avance dans la campagne. Au fond, on aperçoit le vieux Mons et le clocher de l’église Saint-Pierre. Les grandes maisons bourgeoises du centre n’en ont plus pour longtemps. Elles vont être démolies pour gagner du terrain et élargir le sentier des Prés qui deviendra une extension de l’avenue Schumann, prolongée par l’avenue des Acacias pour rejoindre l’avenue Émile-Zola. On construira sur les parcelles libérées une pompe à essence, qui elle-même sera détruite car moins rentable. Il y a quelques années, on a construit en lieu et place, ce nouveau lotissement. A. C. ( CLP)






Les autres documents non publiés

Ces documents, © Association Eugénies, sont issus de recherches effectuées avec Didier Bataille en vue d'une exposition sur l'architecte Henri Chomette.