Le Moulin Delmar

Pourquoi le nom de Moulin Delmar ?

Cette appellation correspond à l'existence à cet emplacement d'un ancien moulin à vent où se trouvait également une mare. Suivant les époques, le lieu a été orthographié de multiples façons différentes : Moulin del Mare, Moulin de la Mare, Moulin Delemarre, Moulin de la Marre ou plus récemment Moulin Delmar. 


Ce moulin est représenté sur plusieurs plans. Bien que schématique ces illustrations nous rappellent qu'il s'agissait d'un moulin sur socle triangulaire, de type flamand à 3 pieds.

De quand date ce moulin ? 

On trouve une première trace de sa construction dès 1066. En 1242, le nom de ce moulin est cité parmi une cinquantaine d'autres.

Un deuxième moulin à vent lui aurait succédé après sa destruction lors d'un ouragan en l'an 1800. Celui-ci laissera la place à un moulin à vapeur construit à proximité.


Quelques repères historiques

REPERES HISTORIQUES  -  Moulin DELMAR

 

1066

Première citation de la Seigneurie de la Mare dans un acte de Bauduin V réglant les fondations du chapitre de la collégiale Saint-Pierre à Lille.

Cette seigneurie s’étendait sur Flers, Wasquehal, Marcq-en-Barœul et Mons-en-Barœul.

Elle comprenait également la cense de la Pilaterie, ainsi que le moulin de « le Marre ».

Les habitants du fief portaient le nom de « De le Mare ».

 

Dates et faits marquants attestant l’existence d’un moulin :

 

1242

Le moulin de le Mare est cité parmi une cinquantaine connue autour de Lille.

Apparus vers le XIIe s. à la suite des Croisades, le plus ancien est signalé en 1227 à Loos.

 

1411

Dame Marie Moutonne, abbesse, achète une terre « …aboutans dou les viers Lille a le t(er)re de le motte dou moulin delemare » [Archives Abbaye de Marquette]

 

1444

Une communication du baron de Mouveaux précise qu’en 1444, le fief « de quart de quint » à Flers, était longé par le chemin de Lille à Lannoy et par celui de Flers au moulin de la Marre.

[Acte de la bibliothèque communale de Lille – Baron P. de Mouvaux 1939].

 

26.09.1491

Don « a loyal cense a la vesve de feu Guilbert des Barbieux… XVe de t(er)re IIII VII mains ou environ p(ar)my voies et fosse gissans empres le molin de le mare… » [Archives Abbaye de Marquette]

 

02.01.1571

Bail donné par Jacques Bette, seigneur d’Angreau, de Péronnes, La Fontaine, et Warwanne … (aussi propriétaire des moulins d’Ascq et d’Annappes).

 

19.03.1582

Bail donné « … et ferme du molin de le marre avecq c(er)tain lieu manoir et terres scituez en la paroisse de Flers pour Andrieu Crucque …  molinier du molin à vent dict de le marre … »

[Grand Bureau de la Chambre des comptes à Lille le 19.03.1582]

 

St Rémy 1668

Le moulin est cité comme payant une redevance de 1 florin au domaine royal (droit de vent).

 

1672

Un acte de partage de la famille Pierre Salembier et Philippotte Delaoutre, de Wasquehal, situe en 1672 une terre « haboutans de couchant au chemin menant du moulin de le Marre à Lobel à Marcque »

 

17.05.1677

Vente devant les notaires Pottier (Lille) et Suing (Wasquehal) à Pierre Delerue de Wasquehal d’« un moulin à moudre bled gisant à Flers appelé le moulin de le Marre avec un lieu manoir amassé de maison manable et autre édifice … ».

 

19.10.1773

Le Sieur Tailliez, huissier du bureau des finances, remet « au nommé Fris, meunier du moulin Delmare … », un mandat concernant l’ordonnance du 29.11.1736. (Signification de déplacer le moulin et interdiction de le réparer).

 

 

15.04.1774

« Le soussigné (Sieur Delevoye) se transporte au moulin de Le Mar, paroisse de Flers… » pour une nouvelle signification de déplacer le moulin.

 

8.02.1801

19 pluviôse An 9

 

Propriétaires du moulin : François Salembier de Mons-en-Barœul, et Pierre-Joseph Droulers de Wasquehal.

Bail donné à François-Joseph Loridan et son épouse Anne-Marie Lepers.

Stipulé : « …tout un moulin à moudre bled à deux moulages que les bailleurs s’obligent à faire construire sur la motte existante… »

Le moulin initial a-t-il été détruit par l’ouragan du 9.11.1800 ? (18 brumaire An 9).

 

Janv.1813

Le moulin ne sera jamais déplacé. Il est indiqué par le maire de Flers comme étant situé à 20 mètres du chemin de Lille à Roubaix (Enquête napoléonienne).

 

2.12.1819

Mariage de Jean Baptiste Salembier, propriétaire du moulin et de Henriette Bonte.

La petite ferme et le moulin de la Mare comprenait tout le quartier, depuis le cabaret « le moulin Delmar » jusqu'au numéro 46 de la même rue. Les deux numéros 50 et 52 constituaient le corps de logis de la ferme. Le moulin de la Mare s'élevait dans le jardin du numéro 46.  Il était construit sur un terrain d’une contenance de 33 ares, 75 centiares, et 90 milliares.

On voyait encore au début du XXème siècle, derrière le cabaret, l'écurie qui pouvait contenir les 7 à 8 chevaux nécessaires pour la meunerie et la ferme.

 

1827

Les époux Salembier-Bonte font construire un second moulin « à moudre blé » sur un terrain leur appartenant à quelques centaines de mètres. C’est le « moulin au vent de Mons-en-Barœul ».

Pour la construction de ce deuxième moulin, les époux Salembier-Bonte empruntèrent une somme de 5.000 francs à Mme Droulers, le 4 avril 1827.

Ce nouveau moulin lui appartenait donc par moitié.

 

1838 - 1839

Décès d’Henriette Bonte puis décès de Jean-Baptiste Salembier.

Céline, l’ainée des 6 enfants avait à peine 18 ans. Ce fut leur oncle et tuteur Henri-Désiré-Joseph Salembier, cultivateur à Hellemmes qui continua l'exploitation de la ferme et des deux moulins.

Céline se maria plus tard avec Jean-Baptiste Lienard qui devint maire de Flers.
Les trois jeunes garçons Jean-Baptiste, Henri et Louis furent placés après quelques années à la tête de l'exploitation.
Jean-Baptiste-Désiré (1825-1893) épousa Elisa Thery. Ils furent meuniers et en même temps boulangers à Flers. Plus tard, Jean-Baptiste se retira de la société de la meunerie de la Mare pour acquérir et diriger le moulin de Marchenelle (Annappes).
Henri-Edmond (1826-1893) épousa Césarine Vroman et s'installèrent tous deux, au moulin de la Mare dans la ferme des parents puis à Wasquehal au moulin à eau.
Louis (1828-1864) épousa Rosalie Delesalle. Il fut associé avec son frère Henri-Edmond, jusqu'à sa mort en 1864.

 

1856

Henri-Edmond Salembier construit un moulin à vapeur à Mons-en-Barœul, devant le second moulin au vent.

Il était équipé de tous les progrès modernes de l’époque : une machine à vapeur de la force de 45 chevaux, avec bâches, tuyaux, soupape, manomètre, grilles et plaques de fourneaux, une machine à vapeur de haute pression de la force de 14 chevaux avec condensateur, deux potences à lever les meules, quatre paires de meules. Le tout d'une valeur global de 17.000 francs.

 

 

6.06.1861

Plainte du Préfet du Nord à Kolb, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées

concernant la situation du moulin à moins de 70 mètres de la route et qui se trouverait en cours de reconstruction

 

1878

Il ne reste déjà plus que deux moulins sur les plans parcellaires du Fort de Mons-en-Barœul (le moulin initial sur Flers et le moulin à vapeur sur Mons).

Louis-Joseph Salembier arrête cette année-là l’activité du moulin au vent (concurrencée par celle des moulins à vapeur). Il est démoli avant 1885.

 

1885

Le moulin à vapeur de Mons est intégré comme repère sur le plan de bornage du Fort de Mons-en-Barœul.

Il est aussi enregistré dans le registre de préexistence de 1885 (bâtiment n° 4).

 

Années 1970

Démolition des bâtiments du moulin à vapeur de Mons-en-Barœul.

Construction de la ZUP de Mons, Rues du Dauphiné et Paul Milliez, Ecole Montaigne.

 

 

Différentes écritures rencontrées :

Seigneurie de la Mare (1066)

Moulin de le Marre(XIème s. - 1677)

Moulin de le Mare(1242)

Moulin delemarre(1411)

Moulin de la Marre(1444)

Molin de le mare(1491)

Molin de le marre(1582)

Moulin Delmare(1773)

Moulin de Le Mare(1774)

Moulin Del’mar, moulin Delmar(contractions d’usage contemporaines)

Patronymes :   De le Mare (XIème s.)

                        Delemarre (contemporain)

Sources ;

Les moulins de Villeneuve d’Ascq

(de J. Bruggeman – Editeur ARAM 59-62)

Bulletins paroissiaux de Mons-en-Barœul – Déc.1935 et Janv.1936

(par JM. Poutrain - http://jm.poutrain.free.fr/mons-bl/seigneurie_de_la_mare.html)

- Cadastres de Flers et Mons-en-Barœul de 1825, 1829, 1905. Archives municipales de Mons. ADN série 2R et 66J. Site IGN. Internet.

© Association Eugénies /10.2019


Cadastres et plans


Cette carte représente le diocèse de Tournai entre 1559 et le Concordat (plan de 1693). Y figurent plusieurs noms de lieux à l'est de Lille qui sont parvenus jusqu'à nous avec quelquefois une orthographe différente comme : Moulin del Mare, Pilaterie, Magdeleine, Flers, Marque, Mons en Bareoul, Five, Wasquehal, Helemmes, Lezenne, Ronchin, Lecquin, Anstain, Sainghin, Anappes, Ascq, Tressin, Croix. D'autres sont tombés dans l'oubli tels L'Agacherie, L'Anglais ou la Maladrie. Merci à Didier Bataille.


Sur cet extrait du cadastre napoléonien de 1829, on découvre l'emplacement d'un moulin dans ce secteur, qui sera à l'origine de l'appellation du quartier (Archives Départementales du Nord). Un chemin passe à proximité dit chemin du moulin (de la mare), qui rejoint le chemin du gros bois blanc. Actuellement il existe toujours un chemin du moulin Delmar mais à Marcq-en-Barœul, proche de la Cité des échanges dans le quartier de la Pilaterie.


On sait qu'il s'agissait d'un moulin flamand qui reposait sur 3 pieds. Il y a un siècle seuls ces éléments subsistaient. L'un de ces pieds était situé dans le jardin de l'ancien café dit du Moulin Delmar. Un autre serait actuellement dans la voie menant au cimetière.


Sur ce plan du siège de Lille en 1708, l'emplacement du moulin est indiqué. Collection privée


Plan du XVIIIe siècle ADN 441


Plan et carte figurative des manoirs et terres à labeurs situés à Le Marre sur les paroisses de Flers, Wasquehal, Marcq et Mons-en-Barœul tenus et  mouvants de Messieurs les Doyen et chapitre de l’église collégiale de Saint-Pierre en la ville de Lille ADN plan Lille 350



Plan cadastral de 1825 Archives municipales de Villeneuve d'Ascq


Plan masse Archives de Vincennes Photo Paul Povoas

La maison du meunier


Ce cliché qui figure dans un des ouvrages de Jean Bruggeman, sur les moulins, montre l'ancienne  maison du meunier le 7 septembre 1983. On remarque sur la cheminée l'enseigne du moulin. Des publicités pour des boissons comme Orangina et la bière Terken trahissent une ancienne activité comme estaminet en ce lieu.


Au même endroit, il y avait le terminus du tramway I barré. La maison en avancée porte une publicité pour l'apéritif Saint Raphaël qui sera remplacé par un autre alcool.


Le même lieu photographié en mars 2019, des travaux d'isolation sur le pignon de l'habitation de droite, réalisés en 2023, ont masqué la publicité peinte pour une boisson alcoolisée.




Les moulins flamands à 3 pieds


Le moulin de Cassel, exemple typique de moulin flamand.


Ci-dessus, le moulin d'Attiches, sur une ancienne carte postale, et ci-dessous le moulin de Quiévy, deux exemples de moulin flamand à 3 pieds.



Mons-en-Barœul : Andrée et Yves sont désormais la mémoire de leur quartier.

Article publié par Alain Cadet dans La Voix du Nord le 5 septembre 2016 (édition numérique) et le 6 septembre pour l'édition imprimée.


Avant - Après, la même maison qui était l'ancien café du Moulin Delmar. 

Andrée et Yves habitent depuis l’enfance ce très vieux quartier situé sur l’ancienne route de Roubaix, à la frontière de plusieurs communes. Ils ont vu sa transformation en zone d’activité. Ils sont la mémoire vivante du lieu.


Posée sur la table devant Yves et Andrée le cadre avec l'ancienne photo du café du Moulin Delmar

Yves et Andrée ont vu la campagne laisser peu à peu la place à la zone d’activité. Ils font partie des plus anciens habitants du quartier.

« De tous les anciens habitants du quartier il n’en reste plus que trois, à vivre ici ! Vous en avez deux devant vous », s’amusent Andrée et Yves. Tandis qu’Andrée est née dans la maison de ses grands-parents, le café du Moulin Delmar à Villeneuve-d’Ascq, Yves habitait, dans le même rang à quelques maisons plus loin, à Mons-en-Barœul.

Depuis 30 ans, ils vivent ensemble dans une petite maison située entre leurs anciens domiciles. Même s’ils ont passé leur carrière à conduire des engins tous les deux (Yves était pilote d’essai chez Peugeot tandis qu’Andrée était cariste, en face, chez Goosens) leur histoire n’était pas écrite d’avance. Aujourd’hui, Yves a 77 ans et Andrée, 87 ans, ce qui faisait une grande différence dans l’enfance, mais qui s’est estompée avec le temps.

Ils partagent beaucoup de souvenirs. « À la libération, en 1944, les alliés avaient bombardé les voies de chemin de fer proches, se souvient Yves. Nos maisons avaient été évacuées et nous nous sommes réfugiés, en face, dans les caves de la Brasserie de Mons. ».

« J’y étais aussi, confirme Andrée. Cette route de Roubaix était le lieu de passage obligé des unités allemandes qui se repliaient. La résistance avait investi les maisons. » « Il y avait des tireurs dans la plupart des greniers, se souvient Andrée. Dès qu’un convoi passait, ils entraient en action. » Certaines charrettes étaient traînées par des chevaux et plusieurs de ces animaux ont été tués par les tirs. « Nous n’avions rien mangé pendant quatre ans et je suis descendue avec un couteau prélever un rôti sur un cheval mort. Ma sœur a été dégoûtée ! Elle n’en a pas voulu et n’a jamais mangé 1 gramme de cheval durant toute sa vie. »

Après-guerre, le quartier retrouve sa sérénité. « J’allais à l’école Saint-Honoré, rue Florimond-Delmer, raconte Yves. C’était loin ! Mes parents s’étaient arrangés avec un livreur de la Brasserie de Mons. Il me prenait chaque matin dans sa charrette à cheval et me déposait presque devant l’école. »

Le quartier était très passant. Le terminus de la ligne de tramway se trouvait juste en face du café routier du Moulin Delmar, tenu par la famille d’Andrée. Il y avait toujours une file de camions qui allait jusqu’à l’entrée de l’actuel cimetière qui s’étend derrière la rangée de maisons. Aujourd’hui, tout est paisible. « La zone commerciale n’est pas bruyante et il ne passe pas énormément de voitures », estime Yves. « Quant à nos voisins de derrière, ils sont très calmes », conclut Andrée.


Le café du Moulin Delmar avec au dessus de la porte l'enseigne portant l'inscription : Au Moulin Delmar. Andrée est née dans cette maison, l'estaminet était tenu par ses grands parents qui posent pour la photo.


Un bien curieux quartier

Ce quartier est situé, à la frontière de quatre communes, le long de l’ancienne route de Roubaix. Quand on vient de Lille et qu’on emprunte la rue du Général-de-Gaulle, jusqu’à l’école Montaigne, on est à Mons. Au-delà on, on se trouve rue Jean-Jaurès, à Villeneuve-d’Ascq. Le côté gauche de la rue, quant à lui, appartient à Marcq-en-Barœul et à Wasquehal. Il est entièrement occupé par des zones d’activité à vocation commerciales ou industrielles. Certaines implantations sont très anciennes comme la Brasserie (désormais Heineken), fondée en 1903. Les autres datent des années 1970 jusqu’à aujourd’hui. La zone d’activité Polygone 2 sur le modèle de Polygone 1, mise en place il y a trois ans, est en chantier.

Sur le côté droit, fait face une rangée de très vieilles maisons, réparties sur les deux communes (Mons et Villeneuve-d’Ascq), construites depuis le milieu du XIXe siècle jusqu’à à la fin des années 1870. Une importante partie d’entre elles a été érigée en même temps que le Fort pour loger les officiers et les sous-officiers.

Avant la guerre, leur faisant face, il n’y avait presque rien hormis la vieille Brasserie Coopérative de Mons et la briqueterie Virnot, deux maisons de caractère, que les Monsois appellent « châteaux » (Scrive et Virnot) et deux fermes (Rousselle et Toulememonde). C’était un hameau perdu dans la campagne, avec des champs à perte de vue. Les habitants n’avaient cure d’appartenir à des communes différentes. Ils formaient une seule et même communauté villageoise, soudée, qu’ils habitaient les petites maisons, les fermes ou les « châteaux ». A. C. (CLP)



Vue sur les champs avant la construction de la Zup depuis la ferme Rousselle
© La Voix du Nord - Anne-Marie et Gustave Scrive